Encore une histoire sans fin – partie 4 (et fin)

Partie 3

« … l’idée, ce n’est pas tant de marquer un endroit de son empreinte mais de laisser un endroit nous marquer de son empreinte »
(Kate Harris dans Sur les terres des frontières perdues)

Photo: Julien Nury

En 1980, la Pomme d’or représentait l’avenir. En 2000, la Pomme d’or était devenue une classique et la Ruée vers l’or représentait l’avenir. En 2021, la Pomme est gravie plusieurs fois par semaine et la Ruée est maintenant une classique. Et on ne sait pas encore ce que nous réserve l’avenir. Ni qui va l’écrire.

Mathieu Gosselin s’élance dans la Pomme en 2021 avec une très belle vue sur la Ruée.

Photo: Frédéric Branch

Mathieu Péloquin à la fin d’une grosse journée de grimpe qui s’est terminée à 3h du matin. La journée (de rééquipement) qui a permis à la Ruée de devenir une classique.

Ma blonde me demande souvent, quand je reviens de grimper, «Qu’est-ce que t’as vu de plus beau pendant la grimpe ?» Et ma réponse est souvent de lui décrire le sourire de mes compagnons quelque part au cours de l’ascension. Alors je voulais terminer cet hommage à la Ruée vers l’or en vous présentant les sourires de tous ceux qui se sont rendu à son sommet (sauf une équipe qui ne semble pas avoir de photo d’eux-mêmes de disponible). Parce que dans les magazines et sur Internet, on se concentre souvent sur des photos d’action ou de paysages merveilleux. Mais après tout, les sourires, c’est encore bien plus important. Alors Cheeeeese.

Jean-François Morin et Mathieu Péloquin tout de suite après la Ruée. Bonne grimpe, bonne bouffe, bons amis. C’est à cause d’eux tout ça.


Ben Firth et Raphael Slawinski. Un grand sourire après une autre de leurs grandes aventures, la première ascension hivernale de la Greenwood/Locke sur la face Nord du mont Temple.


Guy Tremblay, Maxime Turgeon et Louis-Philippe Ménard. Le sourire après une belle réalisation. Pour eux, la Ruée a été un beau camp d’entraînement pour tout ce qui va suivre.


Carl Darveau, Charles Roberge et Jean-François Girard au sommet. Y’ont même pas l’air fatigués. A walk in the park.


Mathieu Péloquin et Frédéric Branch. Le sourire de ceux qui ne savent pas encore à quel point leur journée sera longue.


Dave Rone et Scott Backes en Norvège dans une autre leurs aventures, Tagbekken, une imposante cascade de 600 m de hauteur. Il y a plus de 125 ans de jeunesse répartie entre eux deux et malgré toute leur expérience, ils m’écrivaient à propos de la Ruée :

«The weather deteriorated all day, and by the time we started the rappels, it was dark and blizzard conditions. As I rapped from the anchors at the top of the 5th pitch, the ends of the ropes were flying all over the place and I had no idea if they were leading to an anchor or not, so I pendulumed way right over to the ice and essentially down climbed on rappel as far as I could and set up a good, but super cramped and uncomfortable rappel anchor a little above the ice overhang. Scott was not happy, ha ha! From there we finally got back on track.»


Jean-Philippe Bélanger, Louis Rousseau et Jasmin Fauteux. Afin de préparer leur journée, «Louis la machine est parti plusieurs heures avant nous pour avoir le plaisir de battre le sentier lui-même et pour être certain qu’une grande quantité de boisson chaude nous attendait à la base. Il nous a même laissé une brioche chacun, cachées dans son traineau juste avant le pierrier!»


Éric Tremblay et moi-même, sur la rivière pendant que Mathieu, Sébastien et Jean-Nicolas sont dans la voie à se faire bombarder par des missiles de glace. Je laisse à nouveau la parole à Éric.

«J’ai toujours gardé le souvenir d’un Noël, il y a une vingtaine d’années, où mon frère a reçu ton guide en cadeau. Il m’y présentait la mythique voie nommée la Pomme d’or. Préférant déjà la présence d’une touche de mixte plutôt que les voies de glace pure, je me suis alors demandé pourquoi ce n’était pas la Ruée qui tenait cette place : son grade de glace difficile et l’ascension mixte qu’elle imposait faisaient d’elle la voie parfaite à mes yeux. Les années passèrent à un rythme bien plus élevé que le nombre d’ascensions de la voie, me faisant comprendre les conditions précaires et le sérieux de l’entreprise.

Et en ce qui concerne l’image que je m’en faisais 20 ans auparavant, la Ruée a facilement surpassée mes attentes : un mélange de glace délicate nous poussant à faire des mouvements de danse contrôlés, suivis de longs passages aussi soutenus qu’engagés; d’autres séquences mixtes qui demandent une force plutôt brute, mais qui nécessitent un jeu de pieds des plus consciencieux. Et le tout dans une ambiance à couper le souffle. Bref, la réalité a dépassé le rêve! »

Et on termine avec Frédéric Maltais et Nathalie Fortin, les derniers à avoir toppé la voie. Ça, c’est du beau sourire de satisfaction.

FIN
Un gros merci à chacun d’eux et à elle ainsi qu’à Stas Beskin et Daniel Martian d’avoir accepté de partager quelques souvenirs avec moi. Avec vous.

1 Comment on "Encore une histoire sans fin – partie 4 (et fin)"

  1. Un super bel article que cette série. Étrange qu’il n’y ait pas de commentaires !!! J’ai toujours trippé sur les gens qui avaient une belle plume, ce que je n’ai pas. Mon langage à moi, c’est plutôt les maths.

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