Par Stéphane Lapierre
Pont-Rouge était le village natal de Gilles Brousseau. C’est lui qui a découvert puis développé le site d’escalade de glace au début des années 1990. Par la suite, le canyon est devenu le laboratoire qui a permis de faire progresser le niveau de difficulté en glace et en mixte au Québec. 2020 verra renaître le Festiglace. Ça me semblait un bon moment pour souligner quelques Premières fois du site.
La première voie du site
Dans sa jeunesse, Gilles Brousseau fait du kayak sur la rivière Jacques-Cartier dans un canyon tout près de chez lui. Dans les années 1980, il nous parle régulièrement du site de l’île aux raisins avec ses murs surplombants souvent mouillés. Il est convaincu que des chandelles de glace impressionnantes doivent s’y retrouver. En 1991, il décide de donner suite à ses souvenirs d’enfance. Avec son copain François-Guy Thivierge, ils découvrent ainsi un site d’escalade majeur. Souvenirs d’enfance (40 m, 5) devient la première voie du site de Pont-Rouge le 9 janvier 1991.
Le premier grade 6 du site
Le 20 janvier 1991, François-Guy et Gilles sont de retour au canyon en ma compagnie. Ils m’offrent de partir en tête dans une impressionnante chandelle qui me donne mal au ventre. Incapable de dire non, je pars pour ce qui deviendra un marathon de près de deux heures, Les Copains d’abord (40 m, 6). Mautadine que les vis étaient difficiles à mettre à c’t époque-là.

L’auteur dans Les Copains d’abord
La première voie ouverte par des Européens
Quelques semaines plus tard, l’Italien Gian Carlo Grassi et le Français Philippe Pibarot passent aussi par le canyon en compagnie de Gilles et François-Guy qui sont vraiment tombés en amour avec le site. Après avoir répété quelques chandelles déjà devenues classiques, ils ouvrent la Source enchantée (25 m, 4+). Ils fileront ensuite en Gaspésie ouvrir quelques futures classiques, dont le Cannelloni du curé (150 m, 5+) et l’Épée de Jade (100 m, 6). Gian Carlo était déjà passé par le Québec une dizaine d’années plus tôt pour faire la première ascension européenne de la Pomme d’or (330 m, 5+) en compagnie de ses amis, les Italiens Renato Casarotto et Guido Ghigo. Bien des Européens viendront ensuite découvrir les cascades de Pont-Rouge grâce au Festiglace qui offrira au site une publicité mondiale.
La première cascade surplombante de bas en haut – le premier 6+
Ce n’est qu’en février 1992 que le duo Thivierge-Brousseau ose s’attaquer à l’impressionnant mélimélo de glaçons déversant de Route 41 (27 m, 6+). Un impressionnant lead par Gilles ! À l’époque, cette cascade était l’une des plus difficiles jamais gravies par un Québécois.

On voit ici Gilles Brousseau dans l’une de ses plus belles réalisations, Route 41, une voie ainsi nommée pour honorer ses 41 ans de jeunesse. Avec pas d’cask !
La première cascade mixte et le premier grade 7
Gilles Girard a eu une courte carrière de chasseur de cascades. Mais elle fut très prolifique. Le 23 février 1995, il s’engage sur la droite du Tube (30 m, 5) dans une série improbable de stalactites surplombantes qu’il rejoint après quelques passages mixtes délicats. Massachusetts (35 m, 7) devient la première voie de ce genre au Québec.

Gilles Girard dans Massachusetts.
La première voie « sport » de Pont-Rouge
Serge Angelucci a grimpé partout sur la Terre. À un très haut niveau. Au Groenland, en Terre de Baffin, dans les Alpes, les Rocheuses, l’Himalaya et ailleurs. Au travers de toutes ces aventures folles, il a trouvé le temps de travailler en moulinette puis d’équiper la première voie « sport » de Pont-Rouge, une série de dièdres et de surplombs rocheux et de stalactites délicates : Icetroman (40 m, M7+ R).

Serge dans Icetroman.
Le premier M8
C’est en février 1998 que s’est tenu le second Festiglace. Deux jeunes hommes motivés, Benoît Marion et Guy Tremblay imaginent une ligne juste avant l’événement et l’équipent. Mais la voie leur résiste. Scott Backes vient faire un tour au Festiglace en tant qu’athlète The North Face. Il demande la permission d’essayer la voie… et l’enchaîne, à vue. Performance des plus impressionnantes à l’époque dans Verglas (40 m, M8).
Benoît et Guy continueront d’ouvrir des voies à Pont-Rouge et ailleurs dans la Belle province, notamment à Saint-Alban, tout près. Benoît ouvrira aussi de très difficiles cascades et voies mixtes à Terre-Neuve et dans l’Est-du-Québec, notamment au pic de l’Aurore, à Percé. De retour au Québec en 2020 à l’âge de 63 ans, Scott est, entre autres, venu gravir la Pomme d’or (330 m, 5+), la Loutre (350 m, 5+) et la Ruée vers l’or (350 m, 6, M7+). Tout aussi impressionnant que sa performance de 1998.

Benoît Marion dans Verglas.
Merci Stéphane pour ton article superbe. Quelle histoire, quelles images !
🙂